Démo des mots #1 : Femme

15 novembre 2010
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« Femme… Je vous aime », « Femme des années 80″, « Femme, femme, femme », « Rester femme », « Où sont les femmes ? » Comment oublier ces chansons, qui figurent, d’après un sondage IPSOS, parmi les chansons sur ladite femme préférées des Français ? Des chefs-d’œuvre ? Loin s’en faut ! Simplement la preuve que le simple usage du mot suffit à attirer le grand public autour de bon vieux clichés sur le sexe faible : la femme enfant, la mère, la femme fatale, la working-girl… que sais-je encore ? Mais au fait, c’est quoi une femme ?

Chez M. Larousse, la femme est un « être humain de sexe féminin ». CQFD ! Pourtant, cette identité, évidente pour nous, femmes de 2010 (sic), n’a pas toujours été de mise, c’est le moins que l’on puisse dire… Remontons ensemble le cours du temps, et posons sur la femme les yeux du passé…
Contrairement à ce qu’en pense M. Larousse, la femme n’a d’abord pas toujours été véritablement un être humain comme les autres : dans les cinq premières éditions du Dictionnaire de l’Académie française (de 1694 à 1798), s’il vous plaît, elle est définie comme « la femelle de l’homme ». Jean-François Féraud, dans son Dictionnaire critique de la langue française (1787-1788), ne manque d’ailleurs pas de pointer le terme de femelle, dont il explique l’usage par la nécessité de faire court : « on se sert de ce mot pour abréger ». Pourquoi pas ?.. L’Académie française ne précisera sa définition que lors de sa sixième édition, en 1835, faisant ainsi de la femme certes une femelle, mais aussi « la compagne de l’homme ». Enfin, au XXème siècle, pas moins, la huitième mouture paraît, qui la promeut au statut extraordinaire d’être humain. Et l’Académie créa la femme actuelle. Enfin …disons, celle de M. Larousse: « Etre humain de sexe féminin, la compagne de l’homme ». Ouf ! Il était temps…
Il faut dire qu’on revient de loin ! Le mot femme, qui apparaît au début du Xème siècle, vient du latin femina, signifiant « qui est sucée, qui allaite ». La femme est donc bien d’abord la femelle, celle qui nourrit ses petits. Plus, cette racine se rattacherait à une autre, plus ancienne et de source indo-européenne, °Dhē, « téter », tout comme le terme latin fellare, « sucer », qui donnera bien sûr « fellation », mais aussi felix, « heureux ». Notons qu’à cette époque, le mot femina prend d’abord le sens de femelle d’animal, avant de qualifier celle de l’homme. Dans son Dictionnaire historique de la langue française, Alain Rey précise que le terme moderne de femme désigne jusqu’en 1829 aussi bien la femme que la femelle de l’animal.

Que faire de tout cela ? La femme aurait-elle la lourde charge de rendre hommes et enfants heureux et faisant de son corps animal une source de plaisir ? Devons-nous nous insurger contre un mot qu’on peut facilement juger avilissant ? Non. Il ne s’agit sans doute là que de cousinage entre des termes liés par un ancêtre lointain, le fameux °Dhē, et depuis longtemps oublié. Mais quand même…. Quoi qu’il en soit, reste que l’étude du mot (et il y aurait encore beaucoup à dire) ne parvient finalement pas à véritablement définir la femme, qu’on ne saurait en aucun cas ne considérer que comme la compagne de l’homme, même si c’est ce que les dictionnaires ont de mieux à lui offrir…

Pour aller plus loin
Le mot du mois : « femenie », au Moyen Âge, désigne le sexe féminin.
Le Robert, Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction de Alain Rey, Paris, 1998.

http://www.lexilogos.com

Photographie : Cédric Chort

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