#13-Être vintage : Luise

15 février 2012
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Il y a dix ans, les trentenaires m’énervaient avec leur nostalgie à deux balles, leur état de dépressif chronique et leurs chansons « douces-amères » (ce que j’ai pu haïr ce qualificatif!) sur le temps qui passe. Mais il y a dix ans j’étais dans le Bel Âge… La trentaine était loin. Maintenant elle est tout prêt… et si les trentenaires m’énervent toujours avec leur nostalgie à deux balles, leur état de dépressif chronique et leurs chansons « douces-amères » (ce que je peux haïr ce qualificatif!) sur le temps qui passe, je comprends mieux pourquoi.

J’ai eu 16 ans à la fin des années 90. J’ai été fan de Blur, fan des Smashing Pumpkins, j’ai porté des jeans troués, des DocMartens et un tee-shirt Zero, j’ai méprisé l’engouement populaire de la Coupe du monde 98 du haut de ma morgue d’adolescente rebelle, je me suis pensée seule au monde et incomprise de tous en écoutant l’Unplugged de Nirvana, me suis prise de passion pour Trainspotting (le livre et le film) et pour la vie dans un vieux bus comme dans Sous le règne de Bone de Russell Banks, j’ai voulu faire de la magie noire comme dans Dangereuse Alliance (The Craft), j’ai écrit à Rocksound (et ai été publiée) (et reçu plein de lettres) (et rencontré plein de rockeux). J’ai aussi dansé sur la Macarena, imité les Spice Girls (j’étais Victoria), tancé ma sÅ“ur qui écoutait de la merde R’n'B avec des filles presque à poils dans des clips vulgo-machistes, vu le tout premier Scream, joué à la Playstation, pensé, en voyant le premier clip de Britney Spears, que ça ne marcherait jamais (magie noire j’ai dit, pas divination !).
Le problème n’est pas tant ce que j’ai fait que ce que je fais toujours : porter des Docs, des jeans troués et des tee-shirts de groupes (que je connais) (et que j’écoute) (je ne me la joue pas avec un tee-shirt des Clash acheté chez H&M), écouter les Smashing Pumpkins, Nirvana, Blur (mais genre les albums sortis à cette époque) (facile, me direz-vous, pour Nirvana), mépriser les clips R’n'B vulgo-machistes. Je me suis juste un peu calmé sur la magie noire et j’ai étendu ma connaissance de Wes Craven à l’ensemble de sa cinématographie (et je n’ai plus DU TOUT la silhouette pour figurer Victoria devenue Beckham).

Cela ne veut pas dire que je n’ai pas changé, que je ne m’intéresse pas à ce qui se fait actuellement. Mais avoir le sentiment que sa sensibilité appartient à une époque qui devient vintage est quelque chose de terrible. Les années 90 appartiennent au passé : les émissions télé, les rétrospectives, les grosses fêtes du genre We are the 90′s mettent sous verre cette décennie, comme si elle était irrévocable. Et c’est pour cela que je comprends les trentenaires des années passées : en mettant sous verre la décennie qui nous a marqués, car elle est celle où se sont forgées, du moins cherchées, nos identités, c’est comme ci on nous criait : « Vous êtes vieux ! Vous appartenez au passé ! Vous aussi on va vous mettre sous verre ! ». Enterrés à trente ans, c’est un terrible sentiment. En même temps, si c’est un cercueil de verre, on peut toujours espérer qu’un prince charmant passe par là… D’ailleurs en guise de princes charmants, les gars de Metallica ou Soundgarden, qui annoncent leurs retours, feront parfaitement l’affaire !

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