#1 Une dînette presque parfaite

15 novembre 2010
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On est d’accord, il y a trop de bouffe à la télévision. La vrai mode aujourd’hui est de cuisiner.
Comme Jésus multipliait les pains, la télévision multiplie les émissions culinaires et les publicités où les enfants (voire les fœtus!) dictent aux parents ce qu’on doit consommer au vrai sens du terme. Du pain et des jeux. Aujourd’hui des Kinder et Secret story.

Mais le paradoxe de cette indigestion culinaire, c’est qu’on ne s’empiffre plus car toute cette nourriture est devenue « petite ».

Puisqu’il ne faut pas parler la bouche pleine, on arrêtera de se plaindre. On continuera à regarder les candidats de Koh Lanta (choisir de ) crever la dalle en s’empiffrant de monster munch et de Coca.
Mais le paradoxe de cette indigestion culinaire, c’est qu’on ne s’empiffre plus car toute cette nourriture est devenue « petite ».
En effet, depuis quelques temps on ne nous présente que des accompagnements, des sauces, des aliments « petits ».
Déjà dans le vocabulaire, on mange de moins en moins: Et « goutez-moi ces petites carottes, cette petite vinaigrette, cette petite réduction » (déjà réduite, doit-elle être, de plus, petite ?), « ces petites verrines », et j’en passe et des meilleures.
Dans cette époque où il faut manger/bouger, boire 1,5 litre d’eau par jour, manger 5 fruits et légumes, boire/éliminer, ne pas trop saler/trop sucrer/trop graisser, où il faut exercer une activité physique régulièrement, tout cela répété à longueur de publicité (soit plusieurs heures par jour) asséné au mode impératif ; il faut en plus manger « petit ».

La vraie gastronomie, inculquée par la télévision, est miniature.

Mais si tout cela n’était qu’une figure de style, un vocabulaire qui voulait dire « fin », mais non! même dans nos assiettes, tout est réduit!
Fini le temps des sauces gourmandes, des bons morceaux de viande, des parts généreuses et autres gastronomies qui font envie.
La vraie gastronomie, inculquée par la télévision, est miniature. La mode est aux tomates cerise, aux mini-légumes, aux canapés, aux verrines, aux bouchées, aux cuillerées, aux mini-brochettes de cubes de fromage, aux molécules de nourriture… On ne nous vend plus que des repas tronqués : apéro-dinatoire,plateau repas, plateau télé, brunch, slunch… On va finir (et on commence déjà !) à manger des pilules : on ne mastique déjà plus : smoothies, jus, soupes, émulsions, mousses, molécules…
A l’heure du bio et de la machine à pain, on n’a jamais eu autant d’instruments de cuisine sans jamais en faire.
Je veux me remettre à table, éteindre la télé, apprendre la cuisine avec ma mère, mon père, mes enfants, mon mari. Mais pas dans un cours avec un chef et des inconnus, offert pour la fête des mères ou un enterrement de vie de jeune fille. Je veux refaire un couscous pour l’anniversaire de ma grand-mère, un goulasch pour celui de mon grand-père. Me resservir deux fois parce que c’est bon et qu’on ne me regarde pas de travers parce que manger aujourd’hui, et goulûment, c’est politiquement incorrect.
On devient de plus en plus gros en mangeant de plus en plus petit. C’est tout le paradoxe de la télévision : on déculpabilise en « incitant » à faire au mieux, mais même les réfrigérateurs ont la « petite » télé intégrée. On continuera donc à manger des petits canapés sur notre canapé devenu trop petit, en pensant que tout est au mieux car on a fait (presque) tout ce que la télévision nous a dit.

One Response to #1 Une dînette presque parfaite

  1. Anaphore
    30 novembre 2010 at 13 h 42 min

    Ouais ! Vive la blanquette de veau ! avec un bon Bordeaux !

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