#8-Asi se goza : La folie du kuduro

15 septembre 2011
Par

¡ ASI SE GOZA !1

Nadine - Soirée « Salsa en la playa 2011 » © Carsten Dolsini

« Je ne pourrais croire qu’en un Dieu qui saurait danser » Nietzsche.

J’ai poussé la porte du Café Noir un mercredi de janvier, pour participer aux cours de salsa d’une association qui venait d’être créée. A l’origine, il s’agissait de trouver une activité physique, faire des connaissances et renouer avec mon premier amour : la danse. Six mois plus tard, je pratique une dizaine de danses différentes, je suis plusieurs cours, suis inscrite à des stages, et j’ai enchaîné les festivals toute l’année. Comment ai-je fait pour vivre sans danser ? Est-ce que je vivais quand je ne dansais pas? En tout cas aujourd’hui, je ne peux plus m’en passer. C’est devenu ma drogue. Avec ma bande de fous furieux, nous sommes des boulimiques qui ne s’arrêtent jamais car il y a toujours une autre danse à découvrir, des progrès à faire dans celles que l’on pratique le plus et tellement d’événements à vivre. Dans ma ville de province, dans ma région, mais aussi à Paris ou ailleurs, dans l’est, le nord ou le sud, il existe des tas d’associations ultra dynamiques qui permettent à tout un chacun de s’initier aux danses de couple, danses sociales, latines ou non.

Asi se goza : Pourquoi pas vous ?

Je connais des tas de personnes qui sont enthousiastes quand je leur raconte mes soirées et mes découvertes. J’en connais peu qui passent à l’acte et nous rejoignent. Il y en a même qui sont carrément réfractaires pour des raisons peu justifiées, comme une amie  qui répondait un jour à mon invitation de cours gratuits : « ça va pas, je fais plutôt du self-défense, ça sert à quelque chose au moins ! Parce que la danse c’est vraiment inutile, en plus y a jamais de mec, ou alors c’est de la racaille, et puis supporter la sueur du partenaire qui te dégouline dessus, en te proposant d’aller faire des cochonneries après la soirée, franchement non merci ».  Proximité physique, sueurs à échanger, inquiétude quant aux attentes des partenaires de l’autre sexe, crainte de ne pas réussir et difficulté à y aller seul ou seule : les préjugés sont nombreux et peuvent décourager. Pourtant, il ne faut pas venir en couple, on peut s’inscrire individuellement et on changera toujours plusieurs fois de partenaires durant une séance. Je n’ai jamais été en si bonne santé, et ce grâce à la danse. Il ne faut pas être gymnaste pour danser, cela ne nécessite pas, si l’on en reste au niveau des participants de soirée, un grand niveau sportif. Mais c’est effectivement une activité qui fait brûler des calories sans qu’on ne s’ennuie ni qu’on s’en rende compte. Vous l’aurez compris, j’ai décidé de vous faire partager ma passion, celle des centaines de personnes que j’ai rencontrées en six petits mois de fête, de danses, de progrès, d’émotions intenses.

Ceux qui en parlent le mieux…

Ce seront justement ceux dont j’ai fait la connaissance qui feront ici l’objet d’un portrait et vous diront ce qui, dans la danse qu’ils ont décidé de vous présenter avec moi, leur a fait oublier toutes ces barrières morales et sociales qui peuvent vous retenir un peu ou beaucoup de filer sur une piste de danse. Loin de moi l’idée d’établir une encyclopédie objective des danses sociales, bien d’autres magazines féminins s’y sont frottés plus d’une fois. Pas plus qu’il n’est question d’interviewer les grandes stars du moment de salsa cha-cha, bachata ou west coast swing (dans quelques mois, vous aussi parlerez cette langue des initiés …). Il y a des magazines spécialisées qui s’y attachent avec talent. Moi, ce que je vous propose, c’est de découvrir une ou deux personnes, en général un danseur et une danseuse, qui comme vous un jour je l’espère, ont décidé de s’inscrire dans un cours de danse sociale et sont devenus accros. Ils vous expliqueront ce que cette danse représente pour eux, quelles émotions et sensations ont fait qu’ils ne sont pas prêts de s’en passer. Et maintenant, avec la voix mystérieuse et gourmande de Stéphane Berne devant la porte d’une galerie secrète du château de Chambord, je vous invite dans mon fabuleux palais aux mille et une pistes de danse: « Allez, suivez-moi » et en rythme s’il vous plaît ! A la fin de la choré, il y a, je l’espère VOTRE danse.

Pour commencer : J-C-V-D dans la place !

Ce mois-ci, thématique « Folies » oblige, je vous accueille au milieu d’un Kuduro endiablé grâce à celle qui n’en manquerait aucun : Nadine.

La naissance d’une danse à cause d’un grand fou :

Le Kuduro est la danse la plus folle que je connaisse puisqu’elle est née de l’observation attentive des gesticulations en rythme de Jean-Claude Van Damme bourré. Non, je ne blague pas, c’est la stricte vérité. Si l’on en croit Tony Amado, ce dernier aurait, en 1996, en Angola, inventé le Ku Duro qui signifie « Cul dur » en voyant l’acteur aux pensées philosophiques célèbres  : « Un jour j’ai vu un film où Jean-Claude Van Damme dansait en étant saoul. Il était tellement raide, on aurait dit qu’il avait le cul serré (kuduro). J’ai repris ses pas, accéléré un peu la cadence, et c’est ainsi qu’est née la danse. » (source : Frédéric Galliano, pour Mondomix, interview de Tony Amado, 16 avril 2007). La danse devient vite populaire et rallie les populations modestes sur les pistes des discothèques. Certains chanteurs s’essaient même au message civique ou moral à travers leurs paroles (comme Dog Murras) mais pour l’essentiel, les refrains sont entraînants, les paroles peu recherchées, le rythme répétitif. Et pourtant, la magie opère. A chaque soirée de danse latine, le Kuduro crée l’enthousiasme. Très écouté dans les pays lusophones, comme le Portugal, l’Angola, le Brésil, mais aussi la Guinée, le Kuduro tend à s’imposer dans les festivals salsa comme étant la danse des filles qui ont trouvé trop peu de cavaliers durant la soirée. Mais de nombreux garçons aiment aussi la danser, et cette « tradition » des filles délaissées semble être une interprétation purement française.

Il faut danser, c’est pas compliqué !

Mélange de Break dance, de semba (musique angolaise à ne pas confondre avec la samba), le Kuduro emprunte ses mouvements à la danse africaine. Il s’agit de répéter un enchaînement de pas puis de faire un quart de tour et de le répéter, ainsi jusqu’à la fin de la chanson. En ce sens, le Kuduro fait penser au Madison. On le danse donc à plusieurs, en ligne, mais pas avec un cavalier, même si le plaisir d’un bon Kuduro vient avant tout de la cohésion du groupe. C’est donc une danse de la convivialité et de la joie, qui est plutôt agréable à danser dans le sable, sur la plage, pieds nus, du fait que les pas sont une alternance de mouvements ancrés dans le sol et de sauts. Elle est à portée de tous, même des débutants, d’autant que tout le monde faisant la même chose, personne ne peut se « se mettre en avant » par sa technique. En cela c’est une danse à la fois démocratique et universelle puisqu’on la connaît maintenant un peu partout dans le monde.

Suivez le guide : Nadine reine de la piste !

© Jeremy Tacheau

Quand je vais en soirée, je sais qu’il y aura forcément un quart d’heure Kuduro et que Nadine sera l’une des participantes à suivre. Fervente adepte du Kuduro, elle maîtrise plusieurs chorégraphies et les exécute le sourire aux lèvres… Nadine a toujours plus ou moins pratiqué la danse, dans les bals populaires avec ses parents, ou dans le cadre de cours de moderne jazz. Quand elle a connu son mari, avec la naissance de ses enfants par la suite, elle a dû renoncer un temps à pratiquer un sport pour s’occuper de sa famille. Elle a renoué avec ce plaisir quand les enfants sont devenus adolescents. Step, body jam, LIA…Nadine pratiquait ces activités en salle de sport. Après le décès de son mari, la fille de Nadine lui propose de venir à des cours de salsa animés par une amie. L’amie en question est mariée à un cubain. « Je me suis dit : pourquoi pas. C’est donc grâce à elle que j’ai appris les pas de base et certaines passes de salsa cubaine, j’ai également appris des pas pour danser en ligne, seule, ce que nous appelions des chorégraphies. Un soir, nous sommes allées avec ma  » prof « , Kristel, et des copines dans un bar  » le PCV  » où se passait une soirée salsa, et là j’ai découvert plusieurs danses en ligne, je dis danse en ligne car j’ai appris plus tard qu’il s’agissait de kuduro. Je voyais des filles surtout mais aussi quelques hommes danser sur une ligne les uns derrière les autres sur des musiques latines, il s’agissait de pas chorégraphiés, qui se répétaient tout au long de la chanson. J’ai trouvé cela très sympa, j’ai tout de suite voulu essayer et je me suis glissée parmi les danseurs, j’ai repéré les pas qu’ils faisaient tout en essayant de les imiter, et c’est comme ça que j’ai commencé à danser le kuduro. Un an plus tard, je me suis inscrite à l’association la Salsita au Mans, pour continuer à apprendre à danser la salsa cubaine, la salsa portoricaine, et le kuduro que j’ai complètement appris pendant les soirées salsa. »

Tout le plaisir est pour soi… Mais c’est meilleur quand on partage :

« Ce que j’aime dans le kuduro, c’est l’indépendance que tu ressens parce que tu es seule maîtresse de ce que tu apprends, c’est aussi un challenge parce que tu dois bien repérer ce que font les autres, tu fais travailler ta mémoire et l’idéal c’est quand tu es en accord avec les autres danseurs, cela donne une chorégraphie très jolie, agréable à voir et à faire. De plus, avec les autres danseurs s’installe une complicité et quand nous connaissons très bien les pas, nous nous  » éclatons  » sur la musique. Je ressens également l’envie de transmettre aux nouveaux venus ce que j’ai appris. Les qualités à développer pour bien danser le kuduro sont : l’observation, la mémoire, l’endurance, la ténacité et l’envie d’apprendre. »

J’ajouterai qu’en voyant danser Nadine, on ne sait pas trop si c’est elle ou le Kuduro qui transmet cette joie de vivre si évidente, mais on ne peut qu’essayer. De soirée en soirée, on s’améliore et on partage un grand moment de complicité avec tous les autres danseurs. Sur les plages, on a la sensation d’être pris dans une vague de mouvements qui vous portent jusqu’à l’exaltation, l’euphorie partagée, une sorte de folie douce, planante et dynamique en même temps. Quant à Jean-Claude Van Damme, personne ne peut dire s’il pratique le Kuduro en soirée, mais remercions-le d’avoir participé à cette création bien sympathique !

Où apprendre le Kuduro : Dans les associations de danse latine, aux festivals, dans les manifestations festives angolaises ou afro-carribéennes, certaines discothèques.

A écouter :

Costuleta : « Tchiriri » , « Açúcar » ; Buraka Som Sistema : « Kalemba » (Wegue Wegue) (feat. Pongolove) ; Lucenzo : « Vem Danzar Kuduro » (feat. Big Ali) repris par Don Omar : « Danza Kuduro » , « Morenita » ; King Kuduro : « Il faut danser » , « Le son qu’il te faut » ; Papa London : « Dansa Kuduro » ; Don Omar feat Lucenzo : « Danza Kuduro » :Luky Gomes : « Twiasee », « We Gonna Have it » , « Jenjena ».

http://www.deezer.com/fr/music/kuduro

http://www.luso-paixao.com/news/music/kuduro

A regarder :

A salsa del mar 2010 ( un des plus gros festivals de danse afro-carribéenne de France)

http://www.youtube.com/watch?v=wuBjpAfbtqo&feature=related

A lire/ consulter :

http://www.afromix.org/html/musique/styles/kuduro/index.fr.html

https://www.facebook.com/pages/Kuduro/50169191147

1Asi se goza : C’est comme cela qu’on profite, qu’on s’amuse, qu’on prend du bon temps.

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