#4 Poils, cheveux et parentalité …

15 février 2011
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Halte à la panique, les poils et les cheveux, ça repousse !

© Laura Capaldi

Pour démarrer, je crois qu’il serait sage de dépassionner le débat en disant : halte à la panique, les poils et les cheveux, ça repousse ! Oui, ça parait évident mais quand on voit les conflits qu’une coupe de cheveux peut provoquer, on se dit que ça va mieux en le disant…

Une petite fille qui coupe une grande mèche de sa belle chevelure en douce, un adolescent qui décide de se raser la tête, une ado qui demande à pouvoir aller chez l’esthéticienne, face à tout ça, comment réagir en tant que parent ? Bonne question, à laquelle il va être diablement difficile de fournir une réponse, mais pourquoi ne pas s’autoriser à chercher quelques pistes de réflexion ?

On pourrait déjà commencer par se dire qu’après tout les cheveux et les poils appartiennent à leur propriétaire et à nul autre, et qu’en conséquence, c’est le sus-dit propriétaire qui décide de leur sort. Certes, certes, mais doit-on laisser son fils partir à l’école avec une coiffure néo-punk suite à un « accident » de tondeuse sous prétexte qu’il trouve ça « trop classe » …? Jusqu’à quel âge peut-on, ou doit-on, imposer à nos bambins créatifs des règles en la matière ?

Différencier les petits des grands

Tout d’abord, il convient de différencier les petits des grands, car ils n’ont pas besoin des mêmes réponses bien entendu. Jusqu’à un certain âge, disons l’entrée au collège pour simplifier (pour certains ce sera beaucoup plus tôt, pour d’autres beaucoup plus tard), l’enfant n’a pas encore toutes les cartes en main pour comprendre ce que son image peut renvoyer aux gens qui l’entourent. Il commence à comprendre, ses goûts se développent, notamment en matière de look, mais il reste assez inapte à faire la part des choses, et on constate qu’il agit encore souvent par imitation (rien d’étonnant à ce qu’il veuille se raser le crâne si c’est la coupe qu’arbore son papa). Nous pourrions alors partir du principe que l’enfant peut choisir sa coiffure tant qu’il est capable de l’entretenir, et qu’elle convient à une personne de son âge. Par exemple, « non, ma puce, tu ne peux pas garder tes cheveux jusqu’aux fesses et refuser de les laver et de les peigner », ou « non, fiston, tu ne peux pas teindre ta tignasse en vert comme le voisin néo-punk, tu ferais peur à tes petits camarades à la maternelle. Mais par contre, pour Mardi Gras, on peut te trouver une super perruque ! ».

Les cheveux, c’est personnel, c’est intime, mais ça en dit long aussi sur ce qui se passe à la maison

Trouver des compromis, donc, comme souvent avec les enfants, dans leur intérêt, et soyons honnêtes, dans le nôtre aussi : qui a envie d’affronter le regard lourd de reproches des autres parents à la sortie des classes ? Parce que les cheveux, c’est personnel, c’est intime, mais ça en dit long aussi sur ce qui se passe à la maison, sur les soins et l’intérêt reçus en famille par nos chères têtes blondes. Et que celui qui n’a jamais pensé « mais que font ses parents ? » en croisant un gamin aux cheveux sales et emmêlés me jette la première pierre ! Oui, la coiffure est une des manière de se présenter au monde extérieur, et tant que l’enfant n’est pas en âge de le percevoir ni de le comprendre, ce sont les parents qui en sont responsables, et l’attention qu’ils y portent témoignent de leur capacité à « bientraiter » leur descendance. L’estime de soi se construit au fil des ans, et elle ne peut évoluer que si les figures parentales, quelles qu’elles soient, la nourrissent de manière adaptée.

Disons donc que pour les jeunes enfants, l’idéal est de trouver un juste milieu entre l’envie des enfants, leurs goûts personnels (non, une petite fille n’a pas forcément envie d’avoir les cheveux longs), l’hygiène de base, et l’idée que nous nous faisons en tant qu’adulte de ce à quoi un bambin de cet âge est censé ressembler.

Il n’y a pas que la question de la séduction, mais celle de l’image de soi

C’est en général plus tard que les réels problèmes surviennent, à la puberté, ou un peu avant, lorsque la construction identitaire bat son plein. Votre fille de seize ans veut se teindre ses magnifiques boucles d’or en noir corbeau ? Votre collégien si mignon s’est fait tondre par son pote le voisin ? Votre fille aînée vous demande 15 euros pour une épilation du maillot? Arghhhh… Entre la cool attitude, genre « tu es libre de choisir ton apparence mon enfant » et le million d’arguments qui inondent votre cerveau en panique, que choisir ? Et bien au risque de vous surprendre (ou pas…), je dirais un peu des deux.

Au fond, vous savez très bien que vous n’obligerez pas éternellement votre enfant à se coiffer comme vous le souhaitez, et que vous n’empêcherez pas votre fille d’arriver épilée à la piscine pour son prochain cours de sport. Oui parce que je voudrais préciser qu’une adolescente qui s’épile n’a pas nécessairement l’intention de montrer son corps à qui que ce soit. Dans l’épilation, il n’y a pas que la question de la séduction, mais bien, encore une fois, celle de l’image de soi. Nous voyons sur toutes les affiches des femmes totalement imberbes, donnant l’idée que le poil est laid, sale et qu’il doit être à tout prix éliminé, rien d’étonnant donc à ce que les jeunes filles redoutent de laisser voir leur pilosité naissante. Au lieu de s’étrangler direct à l’idée que la demoiselle veut nécessairement goûter aux plaisirs de la chair, et lui passer un savon, pourquoi ne pas essayer plutôt d’en discuter ? Vous pourrez ainsi essayer de savoir quel genre d’épilation souhaite votre fille, de comprendre quel regard elle porte sur son corps, et l’aider à réfléchir autrement et à se détacher des stéréotypes lisses et froids qui nous sont imposés à longueur de journée. Et là encore, tout est question de mesure, et il est important d’expliquer à une adolescente que, même si elle l’a entendu dans les couloirs, l’épilation intégrale n’est ni nécessaire, ni plus hygiénique, ni plus esthétique.

La puberté est un moment de révolution où l’on voit son corps changer sans pouvoir rien y faire, et bien qu’il soit primordial de respecter l’intimité des enfants, il est toujours possible de leur proposer un dialogue, sans se montrer trop intrusif. Alors bien sûr, on peut avoir envie de dire à un adolescent en plein boum hormonal que son duvet devrait être rasé, parce que là, quand même ça se voit trop, mais après tout, il le sait très bien, et il serait légitime de penser qu’il a le droit de choisir lui-même le jour où il se rasera pour la première fois de sa vie… Quant à savoir s’il y a un âge normal pour commencer à s’épiler ou à se raser, il reste difficile de faire des généralités. La puberté démarre en moyenne à l’âge de 9 -10 ans pour les filles et 12 ans pour les garçons, et elle dure environ 6 ans. Dans ce laps de temps, chaque enfant va évoluer à son rythme, et il est important de le respecter, mais de ne pas rendre ce thème tabou entre vous, pour que l’échange reste possible.

Et n’oublions pas que, au sujet du look, du rapport au corps et du rapport aux autres, l’éducation se fait surtout par l’exemple : ben oui, si Papa a une crête vert fluo sur la tête, rien d ‘étonnant à ce que votre rejeton ait des goûts plus originaux que ses camarades. De même, si Maman hurle à chaque fois qu’elle découvre un poil récalcitrant sur son mollet, difficile pour l’adolescente d’accepter sa pilosité… Tout ça doit être discuté et débattu, afin que les enfants comprennent qu’ils sont tout à fait en droit d’avoir leurs propres goûts, qu’ils soient ressemblants ou non à ceux de leurs parents, mais qu’ils ne sont pas totalement libres d’exercer comme bon leur semble leurs envies en matière d’esthétique. Parce que le monde est comme ça, et qu’on est tous plus ou moins obligés de s’adapter au monde qui nous entoure. Et parce que perso, autant une coupe de cheveux originale, ça peut éventuellement se réfléchir, autant l’épilation intégrale pour une adolescente, ça se discute moins (comme les string taille 8 ans, qui, de mon point de vue ne devraient tout bonnement pas exister…). Les enfants ont un âge qui ne sert pas qu’à savoir en quelle taille les fringuer !

Laisser une certaine liberté capillaire et pilaire à nos enfants semble être donc une bonne idée, mais de là à estimer que, dès lors qu’ils sont en âge de faire des choix, nos marmots sont automatiquement en âge de tous les assumer, n’allons pas trop vite ! Disons plutôt qu’il serait judicieux, sans juger leurs goûts, de leur donner (délicatement si possible) notre avis, et nos conseils éclairés en la matière, d’être là, si besoin est, pour ramasser les pots cassés suite à un véritable échec capillaire, et leur rappeler les vertus de la patience … Parce qu’encore une fois, ça repousse !

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