#22-Le blues d’Asaf Avidan

15 février 2013
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Elle est dans toutes les radios, dans toutes les oreilles, dans toutes les têtes. The Reckoning Song. Popularisée par le remix d’un DJ berlinois, Wankelmut, la chanson s’est propagée à la vitesse de l’éclair jusqu’à servir d’illustration sonore à un téléphone portable. Si la publicité ne m’a pas fait acheter ce téléphone, elle m’a donné envie de me pencher sur ce chanteur au nom étrange et à la voix non moins étonnante : Asaf Avidan. Car c’est bien cette voix qui accroche, celle qu’on imagine d’abord sortir d’une diva noire qui chante du blues, celle dont les accents persistent longtemps, androgyne et géniale, celle qui, même dans le remix électro, plane au-dessus des basses et des beats, essentielle.

Asaf Avidan – ©Dudi Hasson

Je dois bien avouer que, même si je connais peu et n’apprécie pas vraiment l’électro et les productions de DJ, le remix est un tour de force : il réussit à mettre en valeur la voix d’Asaf Avidan tout en créant sa propre identité, son propre son. Et le signe le plus évident, à mon sens, de cette réussite est la vidéo qui l’accompagne. Réalisée par Daniel Franke and Sander Houtkruijer, la vidéo colle parfaitement non seulement au morceau grâce à un montage soucieux de son rythme, mais également aux paroles et en particulier au refrain sur lequel se focalise, en grande partie, le remix : « One day, baby, we’ll be old / Oh baby, we’ll be old / And think of all the stories that we could have told. » C’est-à-dire : « Un jour, babe, nous serons vieux/ Oh, babe, nous serons vieux / Et nous penserons à toutes ces histoires que nous aurions pu raconter. » En quelques minutes, par la superposition plus ou moins chronologique de différentes scènes et séquences, les réalisateurs parviennent à raconter l’histoire de cette vie à vivre, là, maintenant, celle, dans le clip d’un couple à trois, deux hommes et une femme, beautés à la sensualité hypnotique, dont les liens semblent exclure le reste du monde. Eux, puis les autres. Leur histoire, puis le reste. Jeunesse branchée, lookée, qu’on imagine tellement berlinoise, comme l’est Wankelmut, faite de fêtes, de baisers, d’alcool, de rires, de complicité, d’amour, d’une intimité qui envahit, d’histoires à raconter.

Comme quoi, donc, la publicité a parfois du bon. Elle m’aura ainsi permis de découvrir cette vidéo et Asaf Avidan. Et, lui, il est partout pourtant. Tellement que d’abord je me suis méfiée : je m’étais déjà fait avoir avec Lana Del Rey et ses quelques singles sublimes qui cachaient un album décevant. J’ai d’abord écouté la version originale de The Reckoning Song : coup de foudre, bien mieux que le remix : je la chante du soir au matin. J’ai alors jeté ma curiosité sur le reste de l’album où elle se trouve, The Reckoning, sorti en 2009 avec les Mojos. Et là, je dois dire que je ne m’attendais pas à ça. Je pensais trouver un chanteur un peu mièvre et c’est un vrai groupe de rock, puissant, fortement influencé par les années 70 mais sans sonner vieux, que j’ai découvert. On a comparé cette musique à Janis Joplin, Led Zep, d’autres encore : la voix d’Asaf est androgyne, certes, il y a en effet des élans qui font penser à Janis et Led Zep, sans aucun doute, mais Asaf Avidan & the Mojos arrivent à dépasser ces influences pour imposer leur force et leur blues. Car c’est finalement de cela dont il s’agit : de blues, de musique qui parle à l’âme, d’une voix qui touche tout de suite l’auditeur au plus profond, là où il ne savait même pas qu’il pouvait être touché. Un album dont je ne me lasse pas et dont je m’étonne à chaque fois de ne pas être lassée.

Asaf Avidan s’est cependant depuis 2011 éloigné des Mojos et mène une carrière solo concrétisée par un premier album Different Pulses, sorti le 10 janvier dernier. La voix est toujours là, bien sûr, mais le son a changé : moins 70’s, plus froid, proche d’un Mercury Rev notamment, des chansons moins frénétiques, plus structurées, mais ça fonctionne toujours. Comme dans The Reckoning, on entre dans Different Pulses comme dans un chez soi revisité : tout est familier et tout semble cependant nouveau. Plus nouveau toutefois que dans The Reckoning et c’est pour cela qu’il fera très certainement partie de ces albums plus difficiles à l’écoute, sur lesquels je vais devoir revenir régulièrement, attentivement, pour en saisir toute la profondeur pour me l’approprier vraiment. Mais j’aime ce sentiment d’étrangeté, l’impression que c’est fait pour moi mais que l’accès n’est pas immédiat.
Y revenir, sans cesse.

Asaf Avidan est en concert un peu partout. Attention, beaucoup de concerts sont déjà complets !
Toutes les infos, sur son site : http://www.asafavidanmusic.com/

 

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