#8-Qui a peur du point G ? Odile Buisson avec Pierre Foldès

15 septembre 2011
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« Un livre révolutionnaire sur le potentiel encore inexploré du plaisir féminin », nous disait la quatrième de couverture… Euh, comment dire ? Non.

Si je ne m’attendais pas vraiment à lire un livre « révolutionnaire », je pensais au moins apprendre des choses en lisant l’ouvrage d’une gynécologue reconnue ayant réalisé les premières échographies du clitoris. Le buzz du printemps dernier m’avait vraiment fait espérer un bouquin sinon décisif, du moins instructif. Las ! Lectrice assidue de Sexactu et Zone zéro gêne, je n’ai pratiquement rien appris, ni sur le point G ni sur le clitoris. J’ai certes découvert des choses sur Gräfenberg, le « découvreur » du point G, mais les premières informations vraiment précises sur le sujet n’arrivent qu’après de longues dissertations sur l’indécrottable opposition freudienne entre orgasme vaginal et orgasme clitoridien – sur laquelle Odile Buisson ne se prononce qu’à peine, alors qu’il est si simple de se fonder sur les découvertes anatomiques récentes pour rejeter en bloc cette distinction d’un autre âge.

Rien de nouveau, peu de réponses

L’ouvrage n’apporte rien de nouveau, ce qui est très décevant sachant qu’il a été écrit par une gynécologue qui semble avoir contribué brillamment aux progrès des connaissances scientifiques sur le clitoris. Mais de ces expériences, elle ne nous dit que très peu de choses. Insistant lourdement sur le scandale qui les a parfois entourées, se moquant – parfois avec condescendance  – de la pudibonderie de ses confrères, elle se montre pourtant elle-même très prude en ne nous gratifiant d’aucun détail sur l’expérience : une échographie du clitoris pendant le coït ? C’est-à-dire ? Comment fait-on concrètement ? Odile Buisson se trouvait-elle dans la pièce ? Combien de temps duraient ces échographies ? N’espérez pas trouver de réponse à ces questions dans ce livre.

Ce n’est donc pas un ouvrage de spécialistes… mais hélas, ce n’est pas non plus un bon livre grand public. Peu d’informations vraiment utiles pour les non-initiés, et pas le moindre schéma du clitoris, par exemple : difficile de se faire une idée précise si on n’y connaît rien. Mieux vaut lire La Revanche du clitoris de Maïa Mazaurette et Damien Mascret, si l’on veut connaître l’essentiel.

Mais alors, de quoi parle ce livre ? Au vu du sous-titre « Le plaisir féminin, une angoisse masculine », on pourrait s’attendre – et c’est aussi une des promesses de la quatrième de couverture – à un essai sur les causes et les manifestations du manque d’études scientifiques sur la sexualité féminine, notamment dans le milieu médical. L’auteur adopte d’ailleurs volontiers la posture de la pionnière éclairée investie d’une mission civilisatrice auprès de tous ces machos archaïques que sont les médecins français (point de vue adopté également par la préface d’Israël Nisand). Pourquoi pas, mais là encore, bien peu de faits, bien peu d’analyse ou d’exemples, mis à part le récit d’un congrès de médecine.

« À quand l’accouchement à quatre pattes dans la paille ? »

En vérité, ce livre se révèle être un essai fourre-tout, qui se répète beaucoup et aligne les généralités, quand ce ne sont pas les stéréotypes douteux. Ici, on évoque ces « féministes, dont beaucoup semblent redouter le coït comme les bigotes d’autrefois les cornes du diable » ; là, on fait un portrait caricatural des femmes qui allaitent, souhaitent accoucher dans une maison de naissance ou à la maison (« À quand l’accouchement à quatre pattes dans la paille ? Les vaches y arrivent très bien… »). Dans un livre qui par ailleurs s’insurge contre l’insuffisant crédit accordé à la parole et aux souhaits féminins en matière de gynécologie, on peut s’étonner d’un tel mépris ; peut-être faut-il y voir des réflexes corporatistes de la part d’une obstétricienne rétive à ce qui menace la suprématie de sa spécialité ? À côté de passages louables et intéressants concernant la mode de la chirurgie des petites lèvres ou les femmes trouvant leur vulve « laide », on trouve tout et n’importe quoi : le puritanisme étasunien, Michel Onfray, la gestation pour autrui, la parité, la prostitution… Autant de sujets sans réel lien avec le propos du livre, sur lesquels Odile Buisson accumule les propos superficiellement polémiques, sans réelles analyses ni arguments de fond. Tentant d’écrire un essai féministe, elle ne parvient qu’à articuler un fouillis d’idées simplistes parsemées de passages plus ou moins intéressants, le tout en soulignant lourdement par un (!) appuyé le moindre jeu de mots un peu graveleux.

Il reste tout de même quelque chose à sauver de cet ouvrage décevant : l’annexe. Écrite par Pierre Foldès, pionnier de la chirurgie réparatrice du clitoris pour les femmes excisées, elle comporte des pages insoutenables décrivant avec précision les différentes mutilations possibles du sexe de la femme ; un texte très instructif sur l’excision et autres « crimes contre le plaisir féminin ».

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One Response to #8-Qui a peur du point G ? Odile Buisson avec Pierre Foldès

  1. 25 septembre 2011 at 0 h 10 min

    Le point G est une fraude scientifique?…
    L’anatomie vulvaire et celle des organes érectiles est décrite dans les textes d’anatomie. La vulve est l’ensemble des grandes lèvres et du vestibule, avec son appareil érectile : clitoris (gland, corps et racines qui sont la partie cachée du clitoris), bulbes vestibulaires et corps spongiosum, petites lèvres. Ces structures sont localisées au-dessous du diaphragme urogénital, en face de la symphyse pubienne et dans la région antérieure périnéale. Les gynécologues et les sexologues doivent diffuser des informations scientifiques pour les femmes, et non pas de simples hypothèses. « orgasme clitoridien, vaginal, utérin, point G, A, C, U sont des termes qui ne devraient pas être utilisés par les sexologues, les femmes et les média », Les femmes ont droit au plaisir sexuel : chez toute femme en bon état de santé, l’orgasme est possible, avec une stimulation efficace. La stimulation clitoridienne est importante pour atteindre l’orgasme: le clitoris existe chez toutes les femmes (i.e. 100% !), pourquoi donc ne pas le stimuler simplement pendant le rapport sexuel avec pénétration pénienne, ou avec le doigt?…..- Puppo V. Le point G n’existe pas. Re´ponse de V. Puppo a` l’article d’O. Buisson, « Le point G ou l’absence de me´decine sexuelle fe´minine », Gynecol Obstet Fertil 2010;38:781–84.- Puppo V. Anatomy of the Clitoris: Revision and Clarifications about the Anatomical Terms for the Clitoris Proposed (without Scientific Bases) by Helen O’Connell, Emmanuele Jannini, and Odile Buisson. ISRN Obstetrics and Gynecology, vol. 2011, Article ID 261464, 5 pages, 2011. doi:10.5402/2011/261464. and see video in youtube-newsexology Vincenzo Puppo, Physician – Sexologist

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