#18 – Croquer l’ado : l’humour de Kev Adams

15 octobre 2012
Par

Jusqu’à très récemment, Kev Adams était pour moi un peu comme Justin Bieber : l’idole des (très) jeunes, appartenant à un univers que je pensais loin de moi, celui d’une adolescence un peu mièvre, comme le fut celle des groupies des Boys Band dans les années 90. Et je n’ai jamais aimé les Boys Band. Même ma sœur, qui les aima, elle, n’avouait que honteusement que Kev Adams la faisait rire, mais affirmait que jamais elle n’oserait se rendre à l’un de ses spectacles, à cause du public pré-pubère qu’il rameutait. C’est cependant sous cette même impulsion sororale que j’ai découvert qui était vraiment Kev Adams, lors d’une rediffusion télévisuelle de son spectacle. C’est là aussi que je me suis dit qu’il n’y avait que les idiots qui ne changeaient pas d’avis, car j’ai trouvé le spectacle plutôt pas mal. Et même carrément drôle. On sent l’influence de Gad Elmaleh – le jeu avec le public, l’auto-dérision façon anti-héros, les moments qui échappent à l’humour pour aller voir du côté de la danse – mais on se dit surtout qu’un gars comme ce Kev Adams manquait dans l’univers des comiques. On a des spectacles d’hommes – le célibataire, le père, le divorcé, le tombeur ringard, le gros beauf… – des spectacles de femmes – la célibataire, la mère, etc. – des spectacles de minorités – la lesbienne, l’Arabe, le Juif, le gay : un univers d’adultes en somme, comme si les adolescents n’avaient pas d’humour, alors même qu’ils sont souvent le premier public de ces humoristes.

L’adolescence, il le répète assez pendant tout le spectacle, est le thème de The Young Man Show, mis en scène par Serge Hazanavicius. S’il y a une part de connivence, un effet miroir pour les ados qui se retrouvent dans les situations évoquées (les premiers émois amoureux, la chambre à ranger, les relations avec les parents, l’école…), il y a aussi un effet de distance, de douce satire qui fait que le spectacle s’adresse aussi aux adultes, ceux qui rient des comportements de leurs enfants, de leurs élèves, de leurs nièces/neveux/voisins/petits cons dans le bus et ceux qui rient de l’ado qu’ils ont été. Car même si Kev Adams ancre ses sketchs dans un monde contemporain fait de facebook et de téléphones portables, il capte l’essence-même de l’adolescent, cet être un peu informe, entre deux âges, deux envies, deux vies, pris entre ses copains et ses parents.

On retrouve ce même esprit dans sa série SODA (« ados », à l’envers). Elle aussi découverte un peu par hasard (initiation de ma cousine cette fois. Décidément, Kev Adams est une histoire de famille !). La série est constituée de sketchs très brefs où l’on suit Adam (joué par Kev Adams), ses deux meilleurs amis et sa famille. Dans l’esprit des Beaux gosses de Riad Sattouf, entre adolescents mous que seule une présence féminine peut éveiller et parents finalement tout aussi farfelus que leur progéniture, la série poursuit le plaisir des spectacles et sa difficulté majeure, à mon sens : parler des premiers amours et de la sexualité tout en préservant un public très jeune. C’est là que peut se jouer le talent de Kev Adams : dans les allusions, dans le double jeu, dans les clins d’oeil fait aux adultes – ces vieux – que les plus jeunes ne pourront comprendre que plus tard. Mais l’adolescence n’étant qu’un passage et Kev Adams n’étant déjà plus un ado, ce qui attise également la curiosité du spectateur adulte, c’est son devenir : quelle place va-t-il occuper si ce n’est plus celle de l’adolescent ? Réponse peut-être dans son prochain spectacle, Voilà voilà

Le spectacle de The Young Man Show est disponible en DVD, tout comme le coffret de la saison 1 de SODA. Celui de la saison 2 sort le 21 novembre.

Tournée test pour Voilà, voilà… à partir du 19 novembre jusqu’au mois d’avril dans toute la France. Les dates sont disponibles sur son site, ICI.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Suivez-moi sur Hellocoton
Retrouvez Fauteuses sur Hellocoton