#Etés 2011 – Demo des mots : Princesse

1 juillet 2011
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Vous l’aurez sans doute remarqué, les princesses sont à la mode ces temps-ci. Leatizia, Clothilde, Kate et aujourd’hui Charlene. Toutes tellement grandes, belles, minces… On voudrait tant leur ressembler ! Ben oui, la princesse, tout comme elle fait rêver les petites filles, fait rêver aussi les mamans ! Le prince lui, ne fait pas rêver les papas. Il fait aussi rêver les mamans. Il n’y a que les mamans qui rêvent d’ailleurs, c’est bien connu. Mais alors quand on rêve de princes et de princesses, on rêve de quoi finalement ?

Le prince, du latin princeps, premier, est le souverain, celui qui possède le titre de noblesse le plus élevé. Dans une monarchie, c’est le chef. Dans une démocratie, c’est celui qui serait le chef si on ne lui avait pas piqué son trône. Bref, c’est un homme de pouvoir. Un homme d’action. Il porte souvent un uniforme vu qu’il est militaire. D’ailleurs, William travaille dans l’armée et gagne un salaire comme vous et moi (enfin plus élevé…).

La princesse désignait au départ une dignité mythologique appartenant au peuple des Amazones. Mais ce sens-là a bien vite disparu (dommage) au profit, au XIVème siècle, de celui de fille ou femme de prince. Du statut de femme guerrière et indépendante, la princesse est passée à celui de simple descendance ou d’épouse. C’est la princesse des contes de fées, celle qui fait rêver les petites filles habillées en rose, et qui semble sévir particulièrement ces derniers temps. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, mais nous sommes littéralement envahis par le rose et les paillettes, les voiles et les escarpins. A cet âge, la princesse représente surtout l’amoureuse idéale, inévitablement sauvée par le prince charmant. En amour, elle est assez passive, c’est le moins qu’on puisse dire  (la belle Aurore dort, Blanche-neige est morte) quand elle n’est pas reléguée aux tâches domestiques uniquement (Cendrillon fait le ménage, Peau d’âne fait des gâteaux). Bon mais ce n’est pas bien grave, puisque la princesse fait partie d’un monde imaginaire, ce que les enfants savent très bien. Enfin c’est ce que disent les spécialistes.

©Luise Y.

La princesse des mamans (si si) est comme Cendrillon, Peau d’âne ou la Belle au bois dormant : grande, belle, elle porte de belles robes, sourit tout le temps et ne choisit pas de quoi sa vie doit être faite. Bref, la princesse représente la femme idéale ! Que de titres élogieux au sujet de la beauté, du style, de la ligne de nos princesses d’Europe : Leatizia, Princesse des Asturies (Espagne !) est « rayonnante en mode », « magnifique », on loue son élégance et on disserte sur son régime très strict. A l’inverse, Kate fait des fautes de goût, la vilaine : elle a osé mettre à deux reprises des robes qui avaient déjà été portées en public ! Charlène est quant à elle élégante, flamboyante, mais évoque dans Vogue ses « maladresses vestimentaires » : « trouver mon style a certainement été le plus grand des défis. » Bon. Comme Peau d’âne, la princesse doit impérativement être élégante et originale (rappelez-vous les robes couleur de lune, de soleil et d’étoile !) La princesse doit être belle, elle doit être une icône de la mode, dixit Karl Lagerfeld. Mission beauté accomplie.

La princesse vit un conte de fées. Evidemment. Mais ce n’est pas parce qu’on est princesse qu’on vit forcément un conte de fées façon Disney (voyez Lady Di). C’est qu’un véritable conte de fées doit raconter une vie exceptionnelle. Cendrillon, Blanche-neige, Peau d’âne ne sont pas tout de suite des princesses heureuses. Heureusement, nos princesses à nous non plus ne vivent pas le véritable bonheur tant qu’elles n’ont pas rencontré leur prince charmant : elles sont des roturières ! Admirez le terme… La Princesse de Savoie, alias Clothilde Courau, la Princesse des Asturies, ou Leatizia Otiz, la Duchesse de Cambridge Kate Middleton ou encore la future Princesse de Monaco Charlène Wittstock ne sont pas de sang princier ! En d’autres termes, rien ne les destinait à devenir princesses, et ça aussi ça fait rêver. Certes, les princes en ont peut-être marre de se cantonner aux aristocrates, et il est bien temps pour eux aussi de choisir d’épouser qui ils veulent. Pourtant, on ne peut s’empêcher de se demander dans quelle mesure cette vague de roturières ne sert pas aussi leur image vieillissante. Il faut bien vivre avec son temps, et si les souverains déchus veulent encore intéresser, il faut qu’ils nous fassent rêver nom de nom. Mission destin fabuleux accomplie.

Mais un fabuleux destin ne serait rien sans l’accomplissement ultime de toute princesse qui se respecte : la maternité. « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. » Comment illustrer aujourd’hui la fin des contes de fées d’antan ? En diffusant plus que de raison les images de mariages dégoulinant de luxe et de bonheur : invités selects, palais somptueux, sujets admiratifs, sans oublier la robe et la parure sans lesquelles une princesse n’est pas une véritable princesse. Ensuite ? Et bien ça va très vite : il faut procréer ! Kate et William ne sont mariés que de puis deux mois, et déjà des rumeurs d’infertilité circulent. Damned, nous aurait-on trompés sur la marchandise ? Et la lignée alors ? En Italie, en Espagne et ailleurs, les couples princiers font des enfants, comme beaucoup de couples cela dit, et exposent leur bonheur familial. Mission princesse/maman heureuse accomplie.

La princesse ne fait rien de particulièrement intéressant, ou tout au moins elle abandonne ses propres aspirations au profit de son nouveau rôle, tout de bonté et de générosité : Kate a lâché son poste (il faut dire, vendre des farces et attrapes…) et se consacre un temps aux violences à l’école, Laetizia (ancienne journaliste) se voue à la lutte contre le cancer, contre le travail des enfants. Que va bien pouvoir nous trouver Charlène ? Ce ne sont pas les causes qui manquent et elle devrait pouvoir faire facilement son choix. Ce qui importe, c’est surtout que la princesse ne se consacre pas à autre chose qu’à son rôle de princesse. (Mention spéciale à Clothilde Courau, qui, même Princesse de Savoie, poursuit son métier et a même eu le culot de danser au Crazy Horse !) On se souvient d’ailleurs de Grace Kelly, qui mit fin à sa carrière cinématographique en devenant Grâce de Monaco. Mission bonté-dévouement-oubli-de-soi accomplie.

(c)Audrey GC

La princesse est aussi une femme particulièrement sage. Vous souvenez-vous d’avoir vu une seule fois Cendrillon jeter son balais à la face de ses saletés de sœurs, ou blanche-neige envoyer chier les nains ? Non. C’est que la princesse n’est pas une chieuse ou une pimbêche, contrairement à ce que certaines expressions pourraient laisser croire (« faire sa princesse »). Sur le net, on peut par exemple lire que Charlène Wittstock est charmante et discrète. Kate Middleton n’a pas eu le droit de prendre la parole en public pendant des années. Bref, la princesse est un rouage au cœur d’une machinerie bien huilée : le protocole. Bien sûr, il n’est pas aussi lourd qu’autrefois. Mais quand même. Kate, maintenant qu’elle est la Duchesse Catherine de Cambridge, n’a par exemple plus le droit de faire de footing en plein air. Ses tenues vestimentaires seront à l’avenir plus classiques et ses moindres faits et gestes épiés par le monde entier, et en particulier par le Royaume-Uni, qu’elle représente maintenant, en future reine qu’elle est. Si elle a refusé de prêter obéissance au Prince William, modernisant au passage un peu son rôle, elle n’en devra pas moins suivre à la lettre un mode de vie qui ne manquera pas d’être très cadré : règles de bienséance, fréquentations triées, présence constante de gardes du corps, apparitions publiques obligatoires… Mission gentille-jeune-femme-qui-ne-fait-pas-de-vagues accomplie.

Pour résumer, rêver aujourd’hui de devenir princesse c’est quoi ? Ne pas travailler, porter de belles robes, faire des enfants mais aussi des régimes pour rester mince, et poser aux côté de son prince charmant de mari. Quand on parle d’une princesse aujourd’hui, on a beau avoir passé l’âge des Disney, c’est encore une image bien mièvre de la femme qui surgit, où se mêlent la fortune et la médiatisation des stars, à un mode de vie parfaitement bourgeois hérité des années 50, dans lequel la femme est avant tout le faire-valoir de son époux.

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