#5 Garyas, « à deux pas de vivre normalement »

15 mars 2011
Par

Le 24 février dernier, France 2, chaîne française du service public, a diffusé un documentaire de Jean-Michel Carré intitulé Sexe, amour et handicap, à propos de la sexualité des handicapés et de la création d’assistants sexuels. Ayant travaillé avec des handicapés mentaux et ayant été confrontée plusieurs fois à la question du sexe et de la sexualité – fort complexe, car le handicap mental recouvre lui-même plusieurs types de handicap – le sujet m’intéresse, mais, de là où je suis, je n’ai malheureusement pas pu voir ce film. J’ai toutefois lu avec intérêt l’article d’Agnès Giard, ainsi que l’interview de Marcel Nuss, fondateur de la Coordination Handicap et Automnie, et j’ai également été interpelée sur twitter par la colère de Garyas après ce documentaire. Humoriste suisse de 27 ans, handicapé de naissance, il a souhaité réagir et nous expliquer son sentiment.

Garyas

Luise Yagreld. Tout d’abord, quel regard portes-tu sur ton handicap, mais aussi sur le handicap en général ? D’ailleurs quels rapports entretiens-tu avec le mot « handicap » ?

Garyas. Question très intéressante. J’ai parfois tendance à dire que c’est la société qui est handicapée et non pas moi, car si mes soucis de déplacements étaient vaincus, je ne serais pratiquement plus handicapé. Je crois que, en ce qui me concerne, les conséquences sur mon quotidien, du fait que je sois en chaise roulante, me pèsent beaucoup plus que le handicap lui-même : ascenseurs en panne, impossibilité d’accès, temps perdu, retards alors que j’ai tout fait pour être à l’heure… C’est plus le poids psychologique des contraintes liées à ma différence qui m’empêche de vivre et de travailler normalement que le handicap lui-même. Par contre il est essentiel pour moi de dire que l’on doit absolument éviter l’amalgame entre les différents types de handicap, car c’est malheureusement la tendance générale. Concernant le mot, il ne me dérange pas. Par contre je rejette le mot invalide.

LY. Est-ce que la façon dont sont considérés les handicapés dans la société, l’aspect « parquage », « communauté », constituent ce handicap social que tu évoques ?

Garyas. Je crois que dans la société « officielle » ce côté parquage et communauté a tout de même évolué, mais pas encore dans l’esprit de beaucoup de gens. C’est encore un réflexe par exemple de dire « mais pourquoi ils râlent que le catalogue des hôtels ne donne pas d’infos, y a des vacances organisées pour les handicapés non ? ». Les vieux réflexes sont longs à partir. Par contre au niveau politique et public, il y a un vrai écart entre les actes et les paroles. Par exemple en France, on dit que les handicapés peuvent vivre seuls et pas forcément en institution ou en famille, mais on calcule l’allocation de façon à ce que la vie indépendante soit impossible avec ce seul revenu. Je ne connais pas très bien ce dossier n’étant pas concerné, mais si je touchais l’allocation adulte handicapé en France, elle dépasserait à peine mes charges (loyer, téléphone, électricité, téléphone mobile) et je n’ai pas un loyer très important. De plus, avec cette allocation, il serait impossible d’obtenir un appartement en dehors du système social.

LY. Et en Suisse, c’est différent ?

Garyas. Oui, en Suisse il y a un minimum vital, qui, s’il n’est pas atteint par la pension, est compensé par un second service et ce minimum inclut un loyer jusqu’à un certain montant. Etre titulaire de ces pensions permet de louer sans trop de difficulté.

LY. Ce système garantit donc une forme d’indépendance.

Garyas. Voilà, et il y a aussi une allocation pour l’assistance nécessaire, pour couvrir les frais liés au handicap au quotidien, et elle est doublée pour quelqu’un qui vit de façon indépendante. La Suisse a bien compris qu’il est moins cher pour la société de favoriser l’autonomie de ceux qui peuvent vivre autonomes.

LY. Et pour ce qui est de ton regard sur ton corps ? Penses-tu qu’il est différent de celui d’une personne non handicapée sur son propre corps ?

Garyas. Non, je crois qu’on a tous nos complexes et des choses qui nous gênent. Par contre je sais que je ne serais sans doute pas en surpoids si je n’étais pas en chaise roulante et il est vrai que mon handicap provoque un manque de confiance en moi en ce qui concerne l’intimité. Je doute beaucoup d’être « à la hauteur » d’une personne non handicapée sous la couette, mais je pense que ceci disparaîtrait si j’avais une relation suivie. C’est surtout un pas à franchir, des choses à expliquer, ce qui est possible et ce qui ne l’est pas, un obstacle de plus au départ d’une relation.

LY. En as-tu déjà eu ?

Garyas. J’ai vécu deux histoires de coeur à distance seulement. Par contre, j’ai fait mes premières expériences sexuelles hors de toute relation amoureuse : j’ai eu quelques aventures sans lendemain, et j’ai déjà été voir des professionnelles.

LY. Quelle a été leur réaction ? Et ton sentiment en allant les voir ?

Garyas. Mon sentiment n’est pas différent de n’importe quel client je crois. Toutefois, il est difficile de trouver des professionnelles qui reçoivent dans des lieux accessibles ou qui se déplacent à domicile. Pour leurs réactions, un léger malaise au début, puis les choses se passent et, de ce que j’en sais, elles parlent plutôt d’une expérience constructive et sont plutôt contentes de ne pas avoir refusé. Après je dis toujours qu’il y a aussi des cons sur roues, donc je suppose qu’il y a aussi des clients handicapés qui sont de mauvaises expériences

LY. Dans son article, Agnès Giard dit le contraire.

Garyas. Je n’ai pas lu cet article. Par contre, il m’a semblé que le documentaire montrait des professionnelles qui n’étaient pas dans une mauvaise image, qui étaient positivement utiles. Mais il faut savoir qu’en France la prostitution est très cachée car pratiquement interdite, ce qui rend le recours à une prostituée par une personne handicapée très compliqué.

LY. Mais alors, à ton avis, pourquoi vouloir légitimer seulement les aides sexuelles pour les handicapés ?

Garyas. Le simple fait pour une association de donner les coordonnées d’une professionnelle qui peut recevoir des clients handicapés est pénalement du proxénétisme.

LY. En effet, la prostitution en France est légale, mais toute une série de lois la rendent impossible à exercer.

Garyas. C’est un des points qui fait débat en France. Pour moi, il faut appeler un chat un chat, le sexe tarifé a toujours existé, et c’est qu’il a sa raison d’être, pas seulement comme façon de gagner de l’argent. Je pense même que son interdiction ne peut qu’augmenter des frustrations et donc favoriser des comportements qui auraient pu être évités. Notre société de l’apparence fait de plus en plus de « handicapés de la séduction et donc de la sexualité ».

LY. Loin de créer le désordre social, les travailleurs du sexe en favoriseraient alors plutôt l’ordre ?

Garyas. Je pense que c’est une façon de l’ombre de lutter contre une inégalité et qu’empêcher la prostitution amplifie une inégalité qu’il est impossible de résoudre.

LY. Venons-en au documentaire. Qu’est-ce qui t’a donc mis en colère ?

Garyas. Je reviens à mon exemple des vacances. Il est essentiel d’organiser des vacances pour ceux qui ne peuvent pas en vivre « normalement ». C’est une sorte de droit fondamental, tout comme le droit à une vie sexuelle devrait en être un. Mais on voit que dans l’inconscient collectif, l’existence de ces vacances fait penser aux gens qu’il existe des solutions « créées pour » et qu’il n’est donc pas nécessaire de faciliter des vacances « normales » pour les gens qui ont uniquement un handicap de mobilité. Et je crois que, à part un seul témoignage rangé discrètement à la fin du film, le sujet d’Infrarouge a installé le terreau fertile pour que les gens aient la même idée au sujet de la sexualité, pour qu’on en arrive à des pensées ressemblant à « pourquoi il essaie de séduire alors qu’il n’a qu’à appeler une assistante sexuelle ou se trouver une copine handicapée ? ». Et cela a des répercussions sur le quotidien : « Pourquoi adapter les discothèques à des gens qui ne peuvent ni danser, ni séduire? ».

LY. Le travail à faire, plutôt que de créer des assistants sexuels, serait-il alors de progression sur l’insertion des handicapés dans la société ?

Garyas. Il y a malheureusement des handicaps qui rendent impossible une vie sociale normale.

LY. Peut-être que c’est d’eux dont parle le film alors ?

Garyas. Je sais que cela peut choquer de la part d’un handicapé, mais je crois qu’il faut clairement séparer les différents types de handicap. Et c’est justement ce que je reproche à ce documentaire : il aide à créer un amalgame dans l’esprit des gens. On ne peut pas mettre sur le même plan quelqu’un qui a besoin d’assistance heure par heure ou qui ne peut pas communiquer facilement avec quelqu’un qui a « simplement » des soucis de déplacements, ou dans un cas extrême, un amputé d’une jambe. Si on le fait, on augmente la difficulté d’intégration sociale de ceux qui sont à deux pas de pouvoir vivre une vie normale ou presque. Tu remarqueras toute l’ironie de ce deux pas

LY. C’est donc cet amalgame entre différents handicaps qui t’a mis en colère.

Garyas. Principalement oui. Ce reportage a augmenté mon sentiment de handicap et, surtout, m’a semblé aller contre les efforts que je fais au quotidien pour faire avancer la perception du handicap dans l’inconscient collectif.

LY. Mais penses-tu que les assistants sexuels peuvent être une réponse aux besoins, envies, désirs de personnes qui sont moins autonomes que toi ?

Garyas. Bien entendu, c’est une solution pour des gens qui n’en ont pas d’autres, et j’aurais voulu que le reportage aille dans ce sens, qu’il montre que pour de nombreux handicaps, ce n’est pas LA solution. D’ailleurs, j’ai été choqué de voir certaines des personnes handicapées militant pour ce service, car ils devraient plutôt se battre pour ne pas en avoir besoin. En fait, on les sent plutôt résignés à se contenter d’un service de ce genre. Et, en effet, si ce reportage est un reflet de la société, autant baisser les bras et se résigner.

LY. C’est peut-être une solution de facilité pour certains : cela évite les difficultés que tu évoquais tout à l’heure, que ce soit pour nouer une relation amoureuse ou rencontrer une prostituée.

Garyas. C’est ce sentiment là qui m’a mis en colère contre ce film.

LY. Le fait qu’un handicapé doive se contenter de services tarifés pour être soulagé sexuellement ?

Garyas. Plus largement, je l’ai trouvé anti-intégration. Mais de façon générale, dans les médias en France, le handicap se résume à une belle histoire ou à de la pitié. Jamais on ne montre les 98% de normalité qu’il peut y avoir dans la vie d’un handicapé. C’est ce constat qui me fait penser de plus en plus qu’on devrait avoir un candidat handicapé dans une téléréalité 24/24, et que les gens se diraient « Tiens, il vit normalement en fait ».

LY. Ce candidat serait très certainement utilisé en vue d’une belle histoire ou pour susciter la compassion… Par contre, on pourrait imaginer une plus grande visibilité dans les médias ou dans la vie publique. Les gens se rendraient compte que oui, on peut être handicapé et avoir fait des études ou avoir des passions.

Garyas. Au quotidien, les gens qui me côtoient disent qu’on oublie le handicap. Je crois donc qu’il serait bien que les médias permettent aux gens de côtoyer ce quotidien qui fait oublier le handicap, et que cela, ça ferait avancer la société. Pour tous les handicaps on peut changer la pitié en compréhension.

LY. Je reviens au reportage. Sans l’avoir vu, mais d’après ce que j’en ai entendu, il me semble qu’il donnait l’impression qu’il n’y avait qu’une sexualité pour les handicapés.

Garyas. Oui, à une exception près. C’est surtout qu’il montrait des handicapés presque résignés à n’avoir que cette solution là. Il me semblait qu’il n’y avait qu’un seul message : « Pitié, organisez-moi une possibilité d’engager quelqu’un pour avoir une vie sexuelle ». Et j’ai peur que le message reçu par les téléspectateurs soit « Même eux pensent qu’ils peuvent se contenter de cela ».

LY : Or une vie sexuelle, handicapés ou pas, ça peut être très différent selon les individus. D’ailleurs, était-il plus question de vie sexuelle ou d’accès au plaisir ? Y vois-tu une différence toi ?

Garyas. J’ai envie de dire que certaines personnes handicapées ne pourront malheureusement pas aller plus loin qu’un accès au plaisir, mais cela reste quand même une minorité des personnes handicapées.

On ne doit pas les oublier, mais on ne doit pas autant pour cela tirer les autres « vers le bas ».

LY. Je pense à mon expérience auprès des handicapés mentaux. Pour certains, la sensualité passait par la tendresse, le fait de former un couple, pas nécessairement par la relation sexuelle.

Garyas. C’est une évidence, et je crois que le reportage a parlé de cela, et pas que de sexualité. De toute façon, jamais un assistant sexuel ne comblera un manque affectif au quotidien.

LY. Faut-il alors distinguer assistants sexuels des autres travailleurs du sexe ? Légitimer les uns et pas les autres ?

Garyas. Pourquoi n’aurait-on pas une sorte de label « accessible aux handicapés » pour les travailleurs du sexe qui le souhaitent, comme on aurait un « carte de crédit acceptées » ? Après se pose la question de la prise en charge financière…

LY. Ta proposition n’est réalisable que si le travail du sexe est reconnu et non plus entravé. En ce qui concerne la prise en charge, n’y a-t-il pas le risque de voir des personnes non handicapées, mais qui n’arrivent pas à nouer des relations, revendiquer cette prise en charge également ?

Garyas. C’est un vrai débat à propos des limites, des solutions… Je n’ai pas de réponse, car pour moi le débat est comment faire qu’une majorité de handicapés n’ait pas besoin de cela.

LY. Oui bien sûr, puisque même pour les non handicapés on peut considérer que le recours à la prostitution est une solution par défaut.

Garyas. En effet, car sinon on en arriverait à un droit à la sexualité pour tous, payée par l’Etat, et c’est tellement ironique que personne n’ose poser la question sous cet angle

LY. En même temps dire que la prostitution est « un mal nécessaire » rejoint cette idée…

Garyas. Un peu, mais personne ne le dit clairement… Sauf que là on parle de personnes à qui on ne donne déjà pas les moyens de se payer des vacances, alors du sexe tarifé…

LY. La question de la sexualité des handicapés n’est donc finalement qu’une partie de ce à quoi les handicapés n’ont pas accès.

Garyas. Tout à fait et j’en reviens aux discothèques. Si on pouvait vivre et sortir sans obstacles, il y aurait des handicapés partout et tout le temps et cela ferait peu à peu oublier le handicap.

LY. Centrer le débat sur un sujet – le sexe – qui est vendeur, c’est occulter un problème global ?

Garyas. Je crois que c’est surtout la seule frustration qui peut vraiment provoquer une compassion chez tout le monde et JUSTEMENT, je ne crois pas qu’il faille provoquer de la compassion.

LY. Tu dis qu’en France on voit peu d’handicapés. A l’inverse, ce qui m’a frappée en arrivant au Canada c’est de voir des handicapés dans la rue, dans le bus, bien plus qu’en France.

Garyas. La France a 30 ans de retard sur l’Amérique du Nord d’après ce que j’en sais. La raison en est probablement la guerre du Vietnam : une grande proportion des handicapés ne l’était pas avant. C’était donc normal pour eux de continuer à accéder à ce qu’ils avaient avant. Pour une personne née handicapée, ce n’est pas un réflexe fondamental de penser qu’on a droit à des choses qu’on a jamais eues. Un soldat devenu handicapé en servant son pays mérite que son pays lui rende au maximum ce qu’il lui a pris, et je crois que cela a beaucoup fait avancer les choses. On n’est pas dans un cas d’injustice de la nature face à laquelle on ne peut pas grand chose. D’ailleurs il ne viendrait à l’idée de personne de proposer une assistante sexuelle à un soldat qui a perdu ses jambes pour son pays… Alors pourquoi on en proposerait une à quelqu’un qui n’a jamais eu ses jambes ?

LY. En effet on suppose qu’il sait y faire d’un point de vue relationnel vu qu’il a pu l’expérimenter avant son handicap.

Garyas. Et surtout, il n’est pas considéré socialement comme un type qui a eu la poisse de la nature.

LY. Du genre « le pauvre, la nature a été méchante avec lui, soyons gentils, offrons lui un assistant sexuel » ?

Garyas. Voilà exactement l’idée que je refuse et j’accuse le documentaire de planter cette idée-là dans les inconscients.

Garyas sur Twitter : @Garyas295

Tags: , , , , ,

10 Responses to #5 Garyas, « à deux pas de vivre normalement »

  1. pascal
    16 mars 2011 at 3 h 42 min

    pour avoir partagé le quotidien de Garyas quelques temps,je ne peux qu’acquiesser à ses dires.

  2. Saki
    15 mars 2011 at 12 h 02 min

    C’est exactement ça… On peut être une personne normale, être handicapé n’est pas une caractéristique essentielle, elle ne définit pas une personne. Et encore moins quelqu’un comme Garyas.

    Ce n’est même pas qu’on « oublie » son handicap, c’est lui même, qui est si vif, si vivant, qu’au final, une chaise sur roulette n’est qu’accessoire lorsqu’on passe un moment avec lui.

    J’ai la chance de le compter parmi mes amis, et je ne comprend que trop bien son point de vue. (et souligne la pertinence de ses propos).

  3. 15 mars 2011 at 11 h 51 min

    Très déçue de l’interview de Garyas. Un avis qui zappe totalement que dans le film de Jean-Michel Carré, il y avait des personnes handicapées en couple, dont certains ayant eu ou entretenant une relation avec une personne valide. Il y fut aussi question de la nécessité de permettre aux personnes vivant en institution d’avoir une vie intime, des espaces et des moments de rencontre.

    Je connais plusieurs deux intervenants ayant participé au documentaire. tous deux militent activement pour qu’on leur permette des rencontres qui ne se limitent pas à celles qu’ils peuvent éventuellement avoir dans le milieu fermé du handicap.

    L’assistance sexuelle n’est pas en opposition avec cela ; il s’agit de quelque chose de complémentaire, offert aux personnes qui en ont besoin. Un combat parallèle. Pour un éveil du corps à la sensualité, offrant autant accès au plaisir que permettant de se préparer émotionnellement à une rencontre sexuelle et/ou affective, pour les privés de tout, mais aussi pour aider les couples handicapés à partager des moments intimes quand l’aide d’un tiers est nécessaire.

    Recourir aux services d’une prostituée, c’est loin d’être facile, d’autant que certaines ne sont pas forcément à l’aise avec le handicap. Et il faut tout de même avoir un minimum de mobilité et d’autonomie. Sortir une personne lourdement atteinte de myopathie congénitale de son fauteuil avec un lève personne et la dévêtir, ça prend une demie-heure… Accompagner une personne handicapée pour qu’elle rejoigne une prostituée, c’est du proxénétisme. Sans parler des lois anti-racolage qui font que les contacter n’est pas chose aisée et qu’elles n’ont pas la possibilité en France d’ouvrir des lieux autogérés pour y accueillir leurs clients ! A voir pour saisir la problématique : le film Nationale 7.

    Et puis, n’oublions pas les femmes ! Trouver un homme prostitué qui veuille bien s’occuper d’elles, c’est encore moins évident. Parmi la population masculine qui se prostitue, il y a des homos et des hétéros quant à eux plutôt tendance gigolos – escorts. Pas vraiment le profil.

    La formation d’assistants s’étant déroulée en Suisse a formé plus d’hommes que de femmes…

    Un peu décontenancée par les propos d’Agnès Giard qui caricaturait les putes sous les traits de voleuses et personnes méprisantes, qui se vengeraient de trouver plus malheureux qu’elles. Sans vouloir prétendre que ce qu’elle affirme n’existe pas, j’en connais une paire qui non seulement sont heureuses de faire leur boulot, mais aussi dont l’humanité est exemplaire.

    Je crois vraiment qu’il faut arrêter de caricaturer les propos de Jean-Michel et des participants à ce film, qui mérite qu’on dépasse une première impression négative pour le regarder à nouveau. Ne serait-ce que pour y voir ce qui apparemment à dû échapper à Garyas. Il n’y avait pas d’amalgames. On y a vu des personnes aux profils divers et aux besoins tout aussi variés. L’assistance sexuelle ne serait qu’un moyen de répondre à certains d’entre eux.

    Je ne vois pas pourquoi on devrait privilégier un type de réponse au détriment d’un autre. On peut bosser sur différents plans pour faciliter la vie des personnes handicapées. Même si c’est une bonne idée, penser qu’organiser des moments festifs et ouvrir les boîtes de nuit aux handicapés suffirait à ce qu’ils puissent tous y rencontrer un partenaire sexuel, c’est une utopie. Comme c’est dit dans le documentaire (et comme me l’a confié un ami lourdement handicapé), on se fait des amies… mais ça en reste là trèèèèès souvent (parce que le handicap rebute pas mal de valides, faut l’avouer, surtout quand il est prononcé). Et toujours, cela nécessite que le handicap ne soit pas très lourd, autant sur le plan physique que mental…

    Moi, j’ai adoré ce documentaire. Il est disponible en DVD, dans un coffret qui comporte aussi le somptueux documentaire sur les travailleurs du sexe.

    • 15 mars 2011 at 12 h 57 min

      Je rajoute juste un petit mot pour préciser mon absolu respect pour Garyas et l’expression de son ressenti. Au cas où l’expression de mon ressenti vis à vis de son interview laisserait penser le contraire.

      Garyas vit en Suisse, où l’assistance sexuelle existe et où la prostitution est réglementée mais où manifestement, on n’en fait pas assez pour offrir de vraies possibilités de rencontres entre valides et « autrement valides ».

      Je réagis en tant que Française où c’est la misère sur les trois plans et où Roselyne Bachelot oppose ses « principes irréfragables » à l’assistance sexuelle. Le documentaire tombait en pleine actualité sur le sujet, pour permettre au public de savoir de quoi il s’agit.

      Et je suis bien d’accord avec Garyas sur le fait qu’il est indispensable de ne pas créer un service qui enferme les personnes dans le monde du handicap, mais penser de multiples solutions en fonction des besoins des gens ;-)

      • 15 mars 2011 at 13 h 26 min

        Pour celles et ceux qui ne l’ont pas vu, le documentaire est en ligne ici :

        http://www.maryhash.com/pages/video16.html

        ;-)

      • 15 mars 2011 at 14 h 06 min

        Merci beaucoup Selina pour tes réactions et pour le lien. Je précise que Garyas est Suisse mais ne vit pas en Suisse, mais en France… La question des assistants sexuels est complexe et il faudrait prendre en compte également les inquiétudes des infirmiers et infirmières, des aides-soignant(e)s, des étudiant(e)s en IFSI qui craignent que ce service leur revienne si le rôle d’assistant sexuel est mis en place en France, même si ce que montre l’exemple suisse c’est un « volontariat ».

  4. 15 mars 2011 at 10 h 07 min

    Aah Garyas … je me souviendrai toute ma vie de la première fois où je l’ai rencontré, c’était après des années d’amitié virtuelle, et j’étais évidemment au courant de son handicap. Lorsque je l’ai vu arriver, ç’a été comme une douche de rappel « Ah, c’est vrai qu’il est en fauteuil ! », puis la journée s’est passée … et au moment qu’il reprenne le train « Ah, c’est vrai qu’il est en fauteuil ! » … mais entre ces deux prises de conscience, une autre, bien plus importante encore « On dirait pas qu’il est en fauteuil, et après tout quelle importance ? » (sauf quand il s’agit de faire passer le-dit fauteuil par des accès non prévus, ce qui est malheureusement trop souvent le cas).
    Et je pensais avant ne pas avoir d’a-priori vis-à-vis des handicapés, mais ce n’est qu’après l’avoir rencontré, et l’avoir côtoyé, que l’on se rend compte que l’on ne peut faire autrement que de stigmatiser lorsque l’on ne connait pas réellement le cœur du problème, et je remercie Garyas de m’avoir permis de passer outre les clichés.

  5. Gali
    15 mars 2011 at 7 h 02 min

    Garyas, c’est quelqu’un qui te fait oublier son handicap. Qui te met à l’aise. Et surtout, avec lui, tu apprends à avoir un autre regard sur les accès handicapés un peu partout.
    J’ai fini par ne plus me poser la question « comment fait un handicapé ? » mais « pourquoi est-ce que Garyas ne peut pas venir jusqu’à chez moi avec les transports en commun ? ».
    C’est un point de vue qui change et qui fait changer les autres.

  6. Kaess
    15 mars 2011 at 2 h 47 min

    C’est vrai que j’oublie souvent ton handicap Garyas. Merci pour ton franc parler, tu n’es jamais autant toi même que quand tu l’ouvres pour donner ton avis.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Suivez-moi sur Hellocoton
Retrouvez Fauteuses sur Hellocoton