#4 Festival du film sexy d’Ottawa : où sont les hommes?

15 février 2011
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Le 11 février dernier, le Mayfair Theatre d’Ottawa accueillait la 3ème édition de Painted Lips and Lolly Licks (que l’on pourrait traduire par « Lèvres peintes et sucettes »), un festival du film sexy. Un film sexy ? Mais c’est quoi un film sexy ? Si l’on en juge d’après l’affiche, un film sexy c’est rose avec une blonde un peu cruche en sous-vêtements. Hum. Mais qu’allais-je faire dans cette galère ? La blonde en question est Bree Olson. Une inconnue pour moi (et l’hybride que mon cerveau crée à partir de ce nom, un mélange entre la rouquine des Desperate Housewives et Nelly Oleson de La Petite Maison dans la prairie, ne me met pas plus en confiance), mais apparemment une star du cinéma porno. Re-hum. Le lieu est cependant très convivial : une salle de cinéma avec des airs de vieux théâtre abandonné, un public prêt à faire les 400 coups et venu en nombre et un programme de films à venir qui me fera sans doute revenir. Mais ce n’est pas le sujet.

En guise d’introduction un petit spectacle burlesque. Moui, bof. Outre le fait que le burlesque, j’en ai un peu ma claque, ce spectacle fait un peu « cheap ». Les filles n’ont pas vraiment l’air de croire à ce qu’elles font. Leurs gestes sont un peu mous, ça manque de passion et d’assurance. Et si je souris, c’est juste parce que la chanson Foxy Lady qui sert à l’un des numéros est à jamais associée pour moi à Wayne’s World. Et que la danse de Garth est bien plus burlesque que toutes ces demoiselles à pasties.

Mais cessons de retarder ces films sexy que vous attendez tous ! Vingt courts métrages venus du Canada et d’ailleurs qui explorent le désir, les corps, le sexe. Mais pas toujours de manière très réussie. Deux grandes tendances se dégagent : l’humour et les filles à poil. Or, si la première ne fait pas forcément le glamour, la seconde en donne une vision assez conventionnelle et biaisée. Car j’ai envie de dire : « Où sont les hommes ? ». Le présentateur nous annonçait de l’audace, des gens de même sexe ensemble. FAUX. Aucun film gay. Des films lesbiens, oui (mais comment savoir s’il s’agit de la vision d’une femme lesbienne et non d’un fantasme masculin ?), mais des hommes entre eux, non. Même des hommes tout court à vrai dire ; du moins, nus. Enfin, si, j’exagère, il y en a un peu. Mais comme toujours la nudité et le plaisir féminins saturent l’écran (ça, c’est vraiment un truc que je ne comprendrai jamais dans les porno et films érotiques féministes : pour exciter une femme spectatrice on lui donne à voir une femme qui jouit…). Parfois, c’est plutôt intéressant (deux films lesbiens d’ailleurs, mais la musique a beaucoup contribué à me les faire apprécier : une chanson des Kills pour Kinda True de Josh Stafford et le Trio Fontenay de Schubert pour Salam and Love de Julien Rotteram), mais le plus souvent, c’est assez convenu. Et même complètement convenu : comme ce Fuck you carlos, film espagnol au doublage anglais improbable, qui n’est qu’un prétexte pour faire du porno avec mecs bodybuildés, blonde vulgaire et éjaculation faciale.

Trois films tirent leur épingle du jeu cependant.

Belle de nature de Maria Beatty. Quelques images convenues (et une introduction bondage inutile), mais une idée de départ intéressante : une femme qui prend son pied avec la nature. Si le début ressemble à une publicité pour une coloration L’Oréal ou pour des serviettes hygiéniques (rappelez-vous, ces spots pour les serviettes à base de sphaigne !), la suite est surprenante : la dame se fouette avec des orties, lèche des écorces, se fait grimper dessus par des scarabées et des limaces jusqu’à ce que l’orage éclate. La pluie, ça mouille.

Fucking is like a prayer de Louise Lush. Même si j’ai trouvé le propos spiritualisant plutôt kitsch, les images de ce couple faisant l’amour faites de gros plans non pornographiquement anatomiques sont empreintes d’une belle sensualité. Et le corps masculin trouve enfin une place loin de clichés. Mais n’exagérons rien : si le sexe de la femme est montré, celui de l’homme restera tabou.

©Indigo Lush

©Indigo Lush

©Indigo Lush

Matière à rêver de Florence Miailhe. Six minutes de tableaux qui se meuvent les uns dans les autres pour créer une multitude de scènes sensuelles, sexuelles, colorées, ambiguës. Une très belle création qui prouve que le désir n’est pas que l’apanage des corps filmés.

Petites mentions spéciales également aux esthétisants Your Dirty Mind de J. Planefeldt (gros plans kaléidoscopiques qui font travailler l’imaginaire érotique de chacun) et Dru de Jihanne Chouaib (lutte chorégraphique entre violence et désir, qui m’a fait penser à Intimité de Chéreau, mais beaucoup trop long car sans véritable propos).

(A noter que Dru, Matière à rêver et Belle de nature sont extraits de la Collection Cyprine de France 2).

Moralité : les femmes s’en tirent mieux que les hommes pour réaliser des films « sexy » (même si je ne sais toujours pas ce qu’est un film sexy !), mais ça manque d’hommes sur les écrans !

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